Le Grand Alain Godon est Berrichon
- Date: Septembre 2015
- Media: L’Echo du Berry
Le Grand Alain Godon est Berrichon
Si Le Touquet reste à ce jour la ville la plus « godonisée » de France, le peintre et le sculpteur français que les galeries de New York et de Los Angeles s’arrachent, Alain Godon est bel et bien Berrichon !
Alain Godon est un grand. De par sa taille d’abord, mais surtout de par son talent. Le caractère unique de ses toiles colorées, résolument positives, lui fait atteindre des sommets dans le monde de l’art. Un succès qui se traduit de différentes manières, à commencer par la cote de ses œuvres.
Peintre « depuis toujours », Alain Godon est également sculpteur depuis dix ans. Et il est aussi l’inventeur du BildoReliefo (qui signifie « relief d’image » en espéranto), un procédé révolutionnaire dans le monde d’art, associant huile sur toile et travail numérique.
Un enfant du cru
Aux antipodes de l’univers « de paillettes » de son métier l’amène très souvent à fréquenter, c’est à Bruère-Allichamps, près de Saint-Amand dans le Cher, que l’artiste passe chaque année ses vacances. En tongs, au bord du Cher (ndlr : et de ses canoës !), il inspire profondément l’odeur de son enfance, sa « madeleine de Proust ». Si l’artiste a vu le jour le 1 novembre 1964 à Bourges, où son père, le docteur Roger Godon, a d’ailleurs été un président de la boxe, toute sa famille vient du sud du département, plus précisément de « Vallenay, et pas Bigny ! » (ndlr : référence à la commune de Bigny-Vallenay) du côté de son père, et de Bruère-Allichamps côté maternel).
« Ma mère est également née à Bourges mais elle est originaire d’une famille bruéroise, sur sept générations : Barrault, Bovais, Jolivard, Bourdon, Lardy et Barvary » énumère l’enfant du cru. Les grands-parents de Paulette Godon habitaient pour leur part au numéro 16 de la route de Noirlac, non loin du Cher. La propriété n’est à ce jour plus dans la famille mais c’est toujours dans une maison bruéroise qu’Alain vient se ressourcer, loin de sa résidence londonienne et de ses obligations professionnelles à New York ou à Los Angeles.
Ce qui ne l’a pas empêché de peindre le Prieuré Sainte-Etienne d’Allichamps, « Le château de ma mère », un peu comme celui de Marcel Pagnol… « Ici, j’ai mon meilleur ami, Bernard Monmasson », salue le peintre. « Il habite à deux pas de chez ma mère, à Vallenay. C’est un type formidable, qui sait me remettre les pieds sur terre et me rappeler d’où je viens ». et d’où il vient, il a grandi dans l’admiration des grands artistes locaux tels Maurice Estève ou encore Marcel Bascoulard. « Le grand-père de mon père, qui a été maire de Vallenay de 1911 à 1919, a d’ailleurs rédigé l’acte de naissance de Bascoulard, rapporte Alain Godon en anecdote. Mais surtout, il vient d’une famille où « tout le monde a des talents artistiques ». C’est son oncle qui lui appris à dessiner et à peindre : « Architecte de métier, il a passé sa retraite à faire des encres de Chine ou des aquarelles des vieilles pierres de Vallenay ».
La couleur au service
Pas étonnant qu’aujourd’hui, le peintre donne vie à l’architecture dans ses toiles hypercolorées . Si la constructions bâtie est de prime d’abord, l’élément dominant de ses œuvres, le peintre a mis en place un langage pictural qui lui es propre. « Je peins la société comme je la vois », explique l’artiste. « Il m’arrive parfois de faire des clins d’œil satiriques mais dans tous les cas mes peintures sont toujours joyeuses ». Alain Godon se situe aux antipodes de l’artiste torturé. « Je vis au présent les choses positives. Le futur, on n’en sait rien, et le passé malheureux, je m’assois dessus pour mieux rebondir. » Pourtant la vie lui a réservé comme à chacun son lot d’épreuves. Et certaines doivent rester privées.
A l’âge de 10 ans, le déménagement familial de Bourges pour Achicourt, non loin d’Arras dans le Pas-de-Calais, précède de peu la disparition de son père, qui laisse derrière lui une jeune veuve dans la panade. Là, il a des difficultés à l’école. Il est dyslexique mais « à cette époque, ce trouble n’était pas encore diagnostiqué » témoigne Alain. Finalement, ce handicap lui permettra de développer son sens de l’image, « un peu comme le borgne qui voit mieux avec un seul œil». Il part alors pour l’Angleterre, « sans un rond en poche, pour apprendre l’anglais » avant de revenir en France pour s’engager dans l’armée à Pau, chez les parachutistes, où il restera deux ans. Le jeune homme enchaîne ensuite des petits boulots, notamment au Touquet Paris-Plage, où il fait des saisons comme barman et vendeur – et où il gérera plus tard des établissements de nuit – avant de suivre la route des saisonnières : Courchevel, puis Saint-Tropez. « Je me suis remonté dans le Nord car une femme me trottait dans la tête… » Et il a bien fait de venir retrouver celle qui occupait ses pensées puisque voilà maintenant trois décennies que sa femme Nathalie partage sa vie : « Elle est ma confidente, mon équilibre, c’est elle qui m’a encouragé à mes débuts. »
Du street art figuratif
Alain avait 18 ans dans les années 80. Il a baigné dans l’univers du graff, du hip-hop et du street art. Fasciné par le personnage de Bert, qui retrace des mondes à la craie sur les trottoirs londoniens dans Mary Poppins, Alain Godon crée, à ses débuts, des œuvres éphémères qu’il produit a même le sol, en face du Louvre, en attendant la pièce. La rencontre avec Régis Dorval sera pour lui déterminante. Le galeriste lillois lui offrira sa première exposition personnelle au Touquet puis à Lille, avant d’importer son talent aux Etats-Unis. Alain Godon compte à ce jour plus de soixante expositions personnelles depuis 1994. Mais c’est aux Etas Unis que ses œuvres vont s’arracher à prix d’or, suite à sa première exposition en Amérique en 1999 à Denver. Puis on lui offrira Central Part à New York, Aspen ou encore Miami, où il sera récemment mandaté pour illustrer le Miami Beach City Report de 2015. Incontournable aux Etats-Unis, il a également présenté ses œuvres à Bali, en Indonésie, aux Pays-Bas et en Suisse… En France, où il a entre-autres exposé aux Tuileries, à Paris, la ville du Touquet a su rendre hommage, de son vivant, à cet artiste hors-norme : des bus « godonisés », un catalogue pour l’exposition Extravaganza (2012), qui est en fait un beau livre d’art, et quantité d’expositions. Pendant quatre ans, de 2009à 2012, l’artiste a organisé et surtout financé personnellement le trophée Alain Godon, qui permettait à quelque 600 jeunes artistes inconnus d’exposer gratuitement, mais aussi de remporter des prix de grande valeur, toujours au Touquet.
Dans le pas de Matisse, « ce génie de la couleur »
Après une année bien remplie (Lille, Miami, Los Angeles et Le Touquet), Alain Godon a le grand honneur de se voir confier la préparation, pour début 2017, d’une exposition pour le musée de Matisse au Cateau-Cambrésis, dans le Nord. « Je vais travailler sur les traces d’Henri Matisse, ce génie de la couleur, à New York, à San Francisco puis à Tahiti, en Polynésie » s’impatiente l’artiste. « Sa peinture me procure la joie ». Fasciné par La Nuit Etoilée de Van Gogh, qu’il est allé voir une deuxième fois à Amsterdam après avoir pris « une vraie claque » au MoMA, à New York, le peintre figuratif admire profondément des artistes tels David Hockney. En France, il estime que Pierre Soulages est « un cador, l’artiste le plus puissant qui existe chez nous ». Modeste et généreux dans sa nature profonde, Alain Godon se considère « comme un artiste étudiant qui vient de terminer ses classes et qui va pouvoir démarrer enfin son œuvre. Je ne suis pas encore un grand artiste ». Pourtant sa réussite professionnelle lui permet largement de financer ses créations. Un luxe que peu d’artistes peuvent se payer. L’entreprise Alain Godon Limited, basée en Angleterre emploie quatre personnes, sans compter les nombreux galeristes qu’il alimente en chefs-d’œuvre…
Dans son Berry, il est un peu ce « Tonton d’Amérique » qui a réussi et qui fait rêver. Mais ici, c’est son domaine, son espace de tranquillité. Là, il voudrait retrouver ses aïeux quand l’heure sera venue pour lui de repeindre les murs d’éternité.